La minéralisation des villes
mai 23, 2017Qu'est-ce que la minéralisation?
Durant les dernières décennies, le Québec a été le théâtre d'un boom de
l'urbanisation. La proportion de personnes vivants en ville est passée de 52%
en 1921 à 81% en 1971. Ce nouveau contexte a apporté son lot de défis relatif à la façon d'organiser nos villes. Un des défis important, entraîner par
la densification de nos espaces urbains, est celui de la minéralisation des
villes. La minéralisation des villes est l'enjeux qui correspond au fait qu'une
part de plus en plus importante de la surface des villes est recouverte de
matériaux imperméables et réfléchissant peu le rayonnement solaire. Le béton
fait, par exemple, parti de ces matériaux très rependu en ville. Par exemple, à
Montréal, la surface boisée dans les zones vouées à l'urbanisation est passée
de 25% en 1965 à moins de 15% en 1995 (Cavayas, Baudouin, 2008, volets 1 &
2). Ces zones boisées sont donc remplacées par des zones résidentielles, des
routes, des stationnements, etc. Si nous continuons à ce rythme, le couvert
végétal de Montréal disparaitra complètement d'ici 2029.
Pourquoi est-ce un problème?
La minéralisation des villes entraîne plusieurs conséquences, du point
de vue esthétique et environnementale. Parmi celles-ci, la conséquence qui
attire le plus l'attention est certainement le phénomène d’îlot de chaleur. Un
îlot de chaleur est une zone urbaine ayant une température pouvant atteindre jusqu’à
10 degrés plus élevés qu'une zone rurale ou forestière voisine. Par exemple, en
2005, le 25 juin, il faisait 21,8 degrés au parc du Mont-Royal alors qu'à deux
coins de rue de là, à l'angle du boulevard Saint Laurent et de la rue
Mont-Royal, il faisait 33,5 degrés. Cette différence de température s'explique
d'abord par le fait que, comme mentionné précédemment, le béton absorbe la
chaleur, pour ensuite la rejeter dans l'air. La deuxième explication est le
manque d'arbres qui font offices de climatiseurs naturels dans leur processus
d’absorption et d'évaporation d'eau dans l'air.
Les îlots de chaleur ont un impact significatif sur l'environnement et
la santé des citoyens touchés par ce phénomène. D'abord, ils augmentent le taux
de mortalité relatif au stress thermique, aggravent la pollution atmosphérique
et favorisent l'accumulation de smog. En plus d'affecter la qualité de l'air
extérieur, les îlots de chaleurs affectent également la qualité de l'air
intérieur, car la température plus élevée favorise la prolifération de moisissure,
d’aquariens et de bactéries. Ensuite, la hausse de température augmente la
consommation d'eau potable et d'énergie notamment à cause des climatiseurs, qui
doivent fonctionner davantage. On estime donc qu'une hausse de 2 degrés, causée
par un îlot de chaleur, peut faire augmenter la consommation d'énergie de 5%.
Solution: la déminéralisation participative
La solution à la minéralisation de nos villes et aux îlots de chaleur
est donc la déminéralisation. Il s'agit tout simplement de diminuer la présence
de matériaux peu réfléchissant et imperméable, en plus d'ajouter de la verdure
dans les espaces urbains touchés par ce phénomène. Il existe plusieurs méthodes
pour aller dans ce sens. Une des plus simple à exécuter est d'opter pour des
toits blancs, qui réfléchissent mieux les rayons du soleil ou, encore mieux,
pour des toits verts qui sont recouverts de verdure. Une autre méthode plus
laborieuse, mais très efficace, serait de déminéraliser des rues et ruelles
touchées par les îlots de chaleur en augmentant la présence de verdure sur la
surface.
Woonerf Saint-Henri avant |
Woonerf Saint-Henri après |
Plusieurs approches peuvent être abordées afin d'appliquer ces solutions,
mais celle qui offre de meilleurs résultats et qui est mise de l'avant par le Centre
d'écologie urbaine de Montréal (CEUM) est l'approche participative. Cette
approche a comme mission d'inclure le citoyen à toutes les étapes du projet. Le
citoyen a donc un rôle à jouer et un impact sur le projet, de l'élaboration
jusqu’à sa mise en place. De ce fait, le savoir technique des professionnels
est parfaitement additionné au savoir des citoyens acquis par l’expérience de
leur quartier. L'approche participative permet donc aux projets d'avoir une
forte acceptabilité sociale, de répondre aux besoins des citoyens et de
produire des espaces qui seront utilisés. Un excellent exemple de cela est celui
du Woonerf du quartier Saint-Henri, qui a été réalisé en collaboration avec le
CEUM. Effectivement, dans le quartier Saint-Henri il y avait une allée
constituer d’une grande surface asphaltée, qui était principalement utilisée
comme stationnement illégal et qui causait un îlot de chaleur. L'arrondissement
de Saint-Henri a donc entrepris un processus participatif avec les citoyens,
afin d'élaborer un projet de revitalisation pour cette allée. À la suite de
visites sur le terrain et d'assemblées publiques, la vision des citoyens a donc
pu être intégrée au projet et le résultat a été l'élaboration du premier Woonerf
montréalais.
Il faut maintenant faire en sorte que de telles initiatives se
reproduisent à travers le Québec et que les municipalités prennent des
engagements clairs en faveur de la déminéralisation des espaces urbains.Par Samy Kaâniche
2 commentaires
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